Hommage à Monique Crokaert, poétesse, épouse de Marc. Eemans, décédée le 4 janvier 2004
Ce texte a été lu le jour de ses obsèques par Robert Steuckers.
Il
est l’heure de prendre congé définitivement de Monique, aujourd’hui, en
cette triste journée de janvier.
Monique, la fille de Jacques, cet
esprit politique génial, jamais remplacé et surtout irremplaçable,
Monique l’effrontée, Monique la poétesse, Monique la compagne de Marc,
Monique qui aimait la vie mais qui n’en avait plus le goût depuis la
mort de son grand artiste de mari, nous a quittés, il y a un peu plus
d’une semaine.
Une
page d’histoire se termine ainsi, trop abruptement. Des souvenirs
poignants et incommunicables viennent de s’effacer. Une époque de
créativité extraordinaire, artistique, littéraire et philosophique,
s’éteint encore un peu plus, avec la disparition de Marc et de Monique à
quelque cinq ans d’intervalle, plongeant ce Pays encore un peu plus
dans la froide obscurité du Kali Youga [Âge de la discorde].
La
langueur qui s’était emparée de Monique depuis le 28 juillet 1998,
quand Marc s’est éteint, est sans nul doute empreinte d’une immense
tristesse, mais elle nous interpelle, aujourd’hui, au-delà de sa mort.
En effet, cette langueur est un appel, qu’elle a lancé à nous tous sans
toujours cherché à bien se faire comprendre, un appel pour que nous
continuions à œuvrer pour faire connaître, pour défendre la mémoire des
peintures, des poèmes, de la pensée mystique de Marc, pour nous souvenir
à jamais des poèmes de Monique, pour nous replonger dans l’œuvre
politique de Jacques Crokaert.
Car
tel était bel et bien le message de cette langueur, et parfois de cette
rage, qui a progressivement exténué Monique au cours de ces cinq
dernières années. Il serait incorrect de ne pas y répondre, car c’était,
au fond, son vœu le plus cher. Que cette formidable mobilisation de
l’intellect, de la volonté, de la sensibilité, de l’esprit n’ait pas été
qu’un simple passage voué au néant. Que ce formidable feu d’artifice ne
soit pas qu’une beauté éphémère. Qu’il y ait pour lui un lendemain. Une
réhabilitation totale et définitive.
Tel était le contenu de mes conversations avec Monique au cours de ces cinq dernières années.
Je
vous demande donc à tous, selon vos moyens, de réaliser son vœu, si
ardent, si noble, si pressant, et de le lui promettre, ici, devant sa
pauvre dépouille, devant celle qui ne pourra plus jamais nous parler,
nous enjoindre de travailler, ou, même, — et je le dis avec tendresse —
de nous “engueuler” parce que les choses ne bougent pas assez vite à son
gré. Justement parce que la verdeur occasionnelle de son langage ne
sera plus, pour aucun d’entre nous, un aiguillon ou un agacement, je
vous demande de continuer ce travail.
Adieu,
Monique, nous allons tous regretter tes poèmes, ta nostalgie de Marc,
ta fidélité très difficile, vu les circonstances, à son œuvre, nous
allons aussi regretter ta verdeur langagière, tes remontrances corsées,
comme nous avons aimé les rouspétances de Marc, aigri d’être sans cesse
boycotté par les Iniques.
Adieu,
donc, et nous travaillerons, pour que les “Fidèles d’Amour” reprennent
le flambeau et leur rôle de guide d’une humanité régénérée, pour que les
“Lumières archangéliques et michaëliennes” resplendissent à nouveau,
comme l’a voulu Marc pendant de longues décennies de combat mystique et
philosophique.
Adieu,
Monique, tu nous manqueras, parce que tu incarnais, tant bien que mal,
parfois en tâtonnant, parfois en te débattant, plusieurs pages sublimes
de l’histoire de notre pays. Adieu, mais, pour ne pas t’oublier, nous
parlerons et reparlerons de ce qui t’a été si cher au cœur.
* * *
[...]
Ce qui séduit cependant dans la démarche poétique de Monique Crokaert
c'est qu'on y parle le langage de tous les jours, de tous les cœurs.
L'auteur n'invente pas des images sophistiquées et ne se contorsionne
pas pour être originale.
La vraie poésie se passe des exercices de gymnastique.
Son écriture est donc limpide, plus que son âme peut-être. Mais au fond de toute femme, la fillette innocente ne subsiste-t-elle pas, ajoutant un charme ambigu à des confidences qui ne sont pas les siennes ? [...]
► Thomas Owen, extrait de son avant-propos de Sulfure d' Alcyone.
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