Cromwell et les Pays-Bas royaux
23 mars 1657: Mazarin s’allie à Cromwell
contre les Pays-Bas Royaux ou Pays-Bas espagnols. L’état de guerre entre
Londres et Bruxelles date de septembre 1655, quand les relations diplomatiques
ont été rompues entre les deux capitales. Le motif de cette rupture est le
fameux “Acte de Navigation”, énoncé par Cromwell le 9 octobre 1651: cet “Acte”
réservait l’exclusivité du commerce avec les îles britanniques aux seuls
navires anglais, à l’exclusion de tous les autres. Cette décision entraîne une
guerre entre les deux puissances protestantes que sont les Provinces-Unies et
l’Angleterre. Ipso facto, la lutte entre les Provinces-Unies et l’Angleterre va
rapprocher les Pays-Bas Royaux, demeurés catholiques, de leurs frères séparés
du Nord, sans que ce rapprochement n’ait été exploité politiquement,
métapolitiquement et culturellement par les avocats contemporains de l’idée de
Benelux ou de la fusion Flandre/Pays-Bas. La lutte connaîtra son maximum
d’intensité en 1652, année où l’espace mosan des Pays-Bas Royaux est ravagé par
les combats entre Condé, passé au service de la Couronne d’Espagne, et le Duc
de Lorraine, d’une part, contre le Prince-Evêque de Liège, allié à Mazarin.
Il faudra attendre la « Paix de
Tirlemont » (17 mars 1654) pour sanctionner la fin des hostilités contre
la Principauté ecclésiastique de Liège, dirigée par un évêque bavarois, Maximilien-Henri
de Bavière, accusé d’avoir voulu ouvrir la vallée mosane aux armées françaises.
Par la « Paix de Tirlemont », la Principauté de Liège acquiert un
statut de neutralité, accepté par l’Espagne. Le gouverneur espagnol de
Bruxelles, Léopold-Guillaume, fils de l’Empereur germanique Ferdinand II, peut
tourner ses forces contre Cromwell. L’état de guerre est proclamé en septembre
1655. Le futur Charles II, prétendant au trône d’Angleterre, forcé à l’exil par
les puritains de Cromwell, est contraint de quitter la France, où il s’était
réfugié, pour les Pays-Bas Royaux. Ce deuxième exil du roi déchu se précipite à
l’instigation de Mazarin qui, en dépit de sa pourpre cardinalice, va s’allier
aux pires ennemis des catholiques. Au même moment, Pieter Stockmans, docteur en
droit de l’Université de Louvain, rédige un traité contestant aux légats
pontificaux le droit d’intervenir dans les affaires politiques des Pays-Bas
Royaux ! Au 17ème siècle, la césure catholiques/protestants
n’est plus aussi nette qu’au siècle précédent.
Les Pays-Bas Royaux sont dès lors coincés
entre la puissance maritime anglaise et la puissance continentale française,
sans qu’interviennent les Provinces-Unies, ennemies de l’Angleterre
cromwellienne. Henri de Turenne, en 1655, harcèle les Pays-Bas Royaux sur leur
frontière méridionale et pénètre en force dans la « trouée de
l’Oise », où il se heurte, victorieusement, aux commandants espagnols,
Condé et Fuensaldana, assistés de troupes lorraines. Turenne grignote les
franges méridionales du Hainaut mais ne parvient pas à atteindre Bruxelles. Entretemps,
Charles II s’installe à Bruges, où il tient sa cour, directement face aux côtes
anglaises. En 1656, la guerre se porte également sur mer : les bâtiments
flamands d’Ostende et de Dunkerque, au service de l’Espagne, se heurtent aux
Anglais en Mer du Nord, à proximité des côtes anglaises (Goodwind Sands). Le
Capitaine ostendais Erasme de Brauwer couvre la retraite des bâtiments flamands
dunkerquois et ostendais et soutient, avec 27 canons contre 36 canons anglais,
le feu ennemi pendant treize heures, avant de couler. Don Juan, fils naturel de
Philippe IV d’Espagne, devient gouverneur des Pays-Bas Royaux et réorganise
l’armée, dont les effectifs, surtout la cavalerie, sont sérieusement étoffés.
Cela n’empêchera pas les Français de prendre, le 5 août 1657, la forteresse de
Montmédy, qui faisait alors partie du Duché du Luxembourg. Le commandant de la
place, Jean de Malandry, refusera de se rendre et tiendra tête, avec 800
hommes, aux 20.000 soldats du Maréchal de la Ferté. Il faudra attendre la mort
au combat de ce courageux capitaine, après six semaines de siège, pour que
tombe la forteresse (qu’on peut visiter aujourd’hui).
Turenne qui assiège Dunkerque depuis 1656,
prend la ville en 1658, après avoir battu aux Dunes l’armée de secours,
commandée par Don Juan et Condé. Les Anglais entrent dans le port flamand et
les Français prennent successivement Bergues, Furnes, Dixmude, Gravelines,
Audenarde et Ypres. Don Juan est rappelé à Madrid. Son successeur est Don Luis
de Benavides, Marquis de Caracena, général de cavalerie à la brillante carrière
militaire. La mort de Cromwell, le 3 septembre 1658 met un terme aux
hostilités. Sous l’impulsion de Jan De Witt, les Provinces-Unies suggèrent une
Union entre elles et les Pays-Bas Royaux sur le modèle cantonal suisse. La
guerre franco-espagnole s’achève par le Traité de Pyrénées, le 7 novembre 1659.
En 1660, Charles II récupère la Couronne d’Angleterre. Le Prince de Ligne
tentera bientôt de rappeler au nouveau monarque anglais l’hospitalité que lui
avaient octroyée les Pays-Bas Royaux, dans l’espoir de lui faire renoncer à
toute alliance qui leur serait hostile et écornerait leur intégrité
territoriale. Les résultats de ses démarches diplomatiques ont été assez
mitigés.
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