Ephémérides de juin
1 juin 1981 : Décès à Milledgeville de Carl Vinson, homme politique
américain, né en 1883. Député au Congrès, il était surtout le
Président de la "House of Naval Affairs Committee", qui plaidait
pour un armement constant des Etats-Unis, qui devaient se tenir prêts
à intervenir partout dans le monde. On disait de lui qu'il contrôlait
le Pentagone tout entier depuis son fauteuil de député. Après Pearl
Harbor, c'est lui qui organisera le réarmement américain, demeurant
en place pendant de longues années. Il a travaillé étroitement avec
trois présidents américain : Roosevelt, Eisenhower et Johnson. Un
porte-avion nucléaire recevra son nom de son vivant. Il est la seule
personnalité à avoir bénéficié d'un tel honneur. Normal pour un
disciple sourcilleux de l'Amiral Alfred Thayer Mahan, père de la
puissance navale américaine, qui permet aux Etats-Unis de contrôler
le monde entier aujourd'hui.
1 juin 1954 : Mort à Hambourg de Wilhelm Stapel. Stapel a commencé sa
carrière au sein de la famille politique libérale en Allemagne, mais
dans la faction de celle-ci qui était animée par Friedrich Naumann,
c'est-à-dire la faction qui avait un sens social aigu et militait en
faveur d'un marché commun étendu à l'ensemble de la Mitteleuropa.
Cette version non manchestérienne du libéralisme allemand prendre une
coloration sociale-nationale, qui s'exprimait dans le "Dürerbund"
(= Fédération Dürer) de Ferdinand Avenarius. Plus tard, pour donner
corps à son engagement, Stapel s'occupe de la formation de la jeunesse
en milieu ouvrier. Il devient ensuite le rédacteur en chef de la revue
Deutsches Volkstum, où, dans les années 20, il développera une critique de la démocratie occidentale jugée trop formelle et
inorganique. Pour réaliser en Allemagne une démocratie idéale, il
faudrait une constitution présidentialiste (à la façon gaullienne
dirait-on, sans risquer de faire un anachronisme trop maladroit), un
mode de suffrage échelonné et une représentation corporatiste. Un
tel corpus n'avait aucune chance de s'ancrer dans les masses. Dans les
années 30, Stapel développe une "théologie" du nationalisme
allemand, lequel doit déboucher sur une vision impériale et non plus
simplement nationaliste. Ses relations avec le national-socialisme
seront assez conflictuelles, mais son système de pensée était trop
hétérogène par rapport au régime de 1949 pour qu'il ait vraiment
été réhabilité.
6 juin 1875 : Naissance à Lubeck de l'écrivain allemand Thomas Mann.
Armin Mohler le compte parmi les esprits fondateurs de la
"révolution conservatrice" pour ses écrits de guerre en 1914-1918
et pour ses "Considérations d'un apolitique", écrites de 1915 à
1918 et parues immédiatement avant la fin des hostilités, en octobre
1918. Thomas Mann y fustige l'esprit occidental, non organique, et lui
oppose une germanité plus respectueuse des ressorts organiques des
sociétés. Il s'inscrit ainsi dans un filon qui part d'Herder pour
passer par les romantiques, tout en rationalisant ses arguments. De
même, dans La Montagne magique (Der Zauberberg), certains de ses
personnages sont les exposants de ces idées allemandes, opposées au
rationalisme occidental.
11 juin 1974 : Mort à Rome de Julius Evola. Né en 1898, Evola
traversera le siècle en commençant sa carrière dans le mouvement
dada de Tzara, afin de faire le vide de toutes les niaiseries
modernistes, libérales et pseudo-démocratiques, vide qu'il remplira
et préconisera de remplir par la Tradition, par les voies
traditionnelles bouddhistes (doctrine de l'Eveil), par le Tao Te King
(qu'il traduira en italien), etc. Le passage d'Evola de l'avant-garde
insolente de dada à l'immersion profonde dans la Tradition a été
relativement long, avec une halte dans la philosophie stirnérienne et
nietzschéenne, c'est-à-dire le théorie de l'individu absolu. La
réception d'Evola à l'étranger est restée marquée par les
épisodes de sa vie au temps du fascisme italien. Ce marquage condamne
à une approche insuffisante de son uvre. Il faut être capable de le
transcender. Il s'avère plus que jamais nécessaire de réétudier à
fond cette phase de transition dans la vie d'Evola. Les recherches qui
s'effectuent aujourd'hui en Italie vont dans ce sens. Et mériteraient
d'être traduites et explicitées pour le public non italophone.
12 juin 1981 : Décès au Caire de Mahmoud Fawzi qui fut Ministre des Affaires Etrangères de l'Egypte sous Gamal Abdel Nasser, puis Premier Ministre de 1970 à 1972. Ce juriste polyglotte formé en Angleterre, aux Etats-Unis et en Italie a été l'un des plus brillants diplomates de l'Egypte indépendante, à une période difficile de son histoire, où son refus de l'alignement lui valait l'hostilité des chancelleries
occidentales.
12 juin 1982 : Mort à Hambourg de l'historien allemand Otto Brunner,né et formé à Vienne. Il effectuera une bonne part de ses recherches sous les auspices de l'Académie des Sciences d'Autriche. Sa
spécialisation première a été l'histoire économique. De cette
position initiale, il est rapidement passé à l'histoire du droit et
du droit constitutionnel médiéval. Les acquis de sa recherche lui
font conclure que la conception bourgeoise et libérale de l'Etat, qui
se cristallise au 19ième siècle, est erronée, trop axée sur les
lois et les règlements, c'est-à-dire sur de purs expédients
provisoires que l'on hisse au rang de vérités éternelles et
intangibles. Le droit médiéval laisse une place aux forces
"supra-légales", intangibles, véritable fond ontologique de
l'humanité européenne, et c'est une institution terrible comme la
"Fehde" qui doit réparer les entorses faites, le cas échéant, à
ce socle ontologique indéfinissable parce que vivant. Finalement,
Brunner se rend compte que les concepts modernes d'Etat, de société
et de culture constituent un rejet impossible de ce socle ontologique.
Ils doivent dès lors faire place à des concepts plus vivants et plus
fluides, tels le Peuple (Volk), le Reich et le pays (Land). Brunner
remet ensuite l'histoire européenne en perspective, dans la mesure où
il voit l'apogée de cette Europe, la pleine adéquation de celle-ci à
son socle ontologique, entre 1200 et 1800. Après, sous les coups de la
modernité, qui oblitère puis étouffe et tue la vigueur ontologique
de la "Vieille Europe", commence le déclin inexorable de notre
monde et de notre culture. Tout ce qui est "durée",
"continuité" et "valeur" (axiologique) disparaît au profit de
pures contingences temporelles. En fin de compte, concluait-il, nous
n'avons plus de réponses à nos questions, mais nous ne pouvons pas
cesser notre questionnement, faute de nous trouver face à un terrible
néant.
14 juin 1888 : Naissance à Bentwisch en Allemagne du théologien Emanuel Hirsch, qui avait eu la volonté de germaniser le christianisme. Il a été aussi le traducteur de toute l'oeuvre du
Danois Kierkegaard. On ne le confondra pas avec l'écrivain Hermann Hirsch, qui appartenait au mouvement religieux de la "foi allemande". C'est donc sur base d'une connaissance profonde de la pensée de Kierkegaard et aussi de celle de Fichte (auquel il consacre un maître-ouvrage en 1914) qu'il développera sa théologie "germanique", une théologie impliquant une éthique très exigeante de l'obéissance, diamétralement opposée aux idées de Tolstoï. La théologie ne peut être séparée de l'histoire réelle du peuple,
laquelle histoire doit être aimée et c'est cet amour qui doit
conduire au salut de tous dans la patrie. La théologie, pensait
Hirsch, ne saurait s'identifier à des prophéties vagues, trop
critiques vis-à-vis des traditions, détachées de l'histoire réelle,
sinon elle s'avère incapable de susciter des vocations efficientes et
d'agir sur la communauté des croyants.
14 juin 1936 : Mort à Londres de Gilbert Keith Chesterton, écrivain et journaliste anglais. Né dans une famille anglicane, où la religion n'avait guère d'importance, il lit dans sa jeunesse les oeuvres de Thomas d'Aquin et du Cardinal Newman, épouse une femme dont la famille appartient aux plus conservateurs des Anglicans, les Anglocatholics, puis devient catholique à son tour, car l'esprit anglo-saxon, estimait-il, reposait sur l'arbitraire du subjectivisme, revenait à faire de l'art pour l'art, à rejeter toutes les lois qui donnent socle aux actions humaines, à laisser libre cours à des tempéraments délirants ou anarchiques.
Chesterton défend ses positions par des
arguments théologiques ou philosophiques solides, mais aussi par
l'humour et la moquerie. Sur le plan politique, il commence par être
un simple libéral de gauche avec des sympathies pour les socialistes.
Mais cette posture lui apparaît bien vite insuffisante, car il voit
tout de suite que derrière les vocables pompeux d'humanisme, de
justice sociale, etc. se cache une inhumanité foncière, une
méchanceté diabolique, une perversité sans nom. Ce libéralisme
hisse les mensonges, ses impostures, au rang de dogmes intangibles.
Dans une telle perspective, la Tradition, pour Chesterton, n'est pas un
musée, que l'on visite de temps à autre par meubler son oisiveté,
mais un réceptacle hautement respectable d'orientations fructueuses
pour l'âme et pour la vie quotidienne. La Tradition nous donne non
seulement les recettes de la sagesse, mais elle nous livre aussi les
linéaments permanents de la volonté populaire. Chesterton a répandu
sur la tête des bien-pensants libéraux sarcasmes et jets cinglants
d'ironie, pour fustiger leur forfanterie. Au-delà d'un catholicisme,
compréhensible dans une société anglo-saxonne parce qu'il constitue
une position antagoniste, Chesterton nous apprend à rire aux éclats
des poncifs qui sous-tendent aujourd'hui la pensée unique et qui
sévissaient déjà de son temps.
18 juin 1903 : Naissance à Idar-Oberstein d'Ernst Rudolf Huber, professeur de droit politique général et de droit administratif.
Disciple de Carl Schmitt, Huber se spécialisera dans les problèmes constitutionnels et tentera de jeter les bases d'un modèle constitutionnel adéquat pour l'Allemagne, en tenant compte des facteurs économiques, historiques et militaires.
En 1939 paraît une première ébauche de constitution. En 1940, il analyse les crises institutionnelles et constitutionnelles du Deuxième Reich de Bismarck.
En 1943, il démontre que l'armée, que le facteur militaire, a toujours été déterminant dans l'histoire politique allemande.
Après 1945, alors qu'il est professeur à Wilhelmshaven dans le Nord de l'Allemagne, il publie en 1957 une vaste histoire constitutionnelle de
l'Allemagne depuis 1789, ouvrage de référence toujours actuel. Huber
demeure un auteur très important en matières de droit et peut encore
servir d'inspirateur pour une constitution européenne conforme aux
traditions juridiques romaines et germaniques, afin de se débarrasser
des schématismes libéraux qui affaiblissent l'Europe depuis plus de
deux siècles.
22 juin 1981 : Mort à Stockholm en Suède de Zarah Stina Leander,
chanteuse et actrice suédoise, qui fit essentiellement carrière à
Berlin entre 1936 et 1943. Sa voix a enchanté tous les soldats de la
deuxième guerre mondiale, à commencer par les Allemands, grâce à sa
chanson à grand succès, Lili Marlene. Immédiatement traduite en
anglais, cette chanson est adoptée par les troupes américaines et
britanniques. Il en existe aussi une version française. Après une
éclipse de quelques années, dues à la chute du Troisième Reich,
Zarah Leander retrouve toute sa popularité dans sa patrie d'origine.
23 juin 1904 : Naissance à Wakefield dans le Massachusetts de l'anthropologue américain Carleton Stevens Coon.
Sa méthode consistait à émettre des thèses en anthropologie sur base d'un matériel archéologique. Son oeuvre majeure a été The Origin of Races (1962), ouvrage controversée à une époque où les études anthropologiques sont systématiquement soupçonnées de consolider un discours "raciste". L'investigation minutieuse des preuves
archéologiques ne peut pourtant pas se réduire à des slogans ineptes, que ceux-ci soient de facture "raciste" ou "anti-raciste".
L'hystérie de ses contradicteurs ne remplacera évidemment jamais le fait qu'il ait examiné plus de 31.000 outils, fragments d'outils ou
récipients destinés à l'agriculture, dont certains remontaient à
6050 av. J. C. et provenaient de la grotte de Hotu en Iran. Ce chantier
archéologique permettait, grâce à sa bonne conservation, d'explorer
plusieurs strates successives de l'évolution préhistorique et
proto-historique, allant du néolithique à l'Age du Fer en passant par
l'Age du Bronze. Mieux, Coon y découvrit des restes humains de l'ère
glaciaire, dont l'examen lui permit d'écrire, en 1954, The Story of
Mankind (= L'histoire de l'humanité), panorama de l'histoire humaine
depuis l'ère glaciaire jusqu'aux temps modernes. Pour Coon, cinq
souches humaines existaient avant l'apparition de l'homo sapiens. Il a
donc été l'avocat de la théorie polygéniste, opposée à la
théorie monogéniste, propre de ceux qui interprètent la Bible
stricto sensu et appartiennent généralement aux sectes protestantes
les plus rétrogrades et propre aussi des "anti-racistes"
professionnels qui se piquent d'un progressisme plus religieux que
scientifique. Parmi les autres ouvrages majeurs de Coon, citons The
Tribes of the Rif (= Les tribus du Rif, 1931) et The Races of Europe
(1939). Carleton Stevens Coon meurt le 3 juin 1981 à Gloucester dans
le Massachusetts.
28 juin 1752 : Naissance à Haimhausen près de Dachau en Bavière de
Karl von Eckhartshausen, figure de proue du Royaume de Bavière.
Pendant un bref laps de temps, il fit partie de l'Ordre des Illuminés
de Bavière, dont il fut exclu. Il se rendit parfaitement compte du
caractère utopique et pernicieux de cet Ordre qui entendait faire du
passé table rase. Après cette aventure, il uvra à faire interdire
les sectes politiques de cet acabit en Bavière. Karl von
Eckhartshausen entame alors un véritable Kulturkampf contre les idées
illuministes et libérales qui ne peuvent induire que des bacilles de
décadence et ruiner en ultime instance les institutions politiques
traditionnelles. Mais la lutte contre l'illuminisme bavarois ou autre
passe par un approfondissement de la religion, y compris de ces
facettes occultes, et ne doit pas se contenter de reproduire la
religion telle qu'elle est. Cette position le rapproche du Tsar
Alexandre I de Russie qui entendait, lui aussi, approfondir la religion
traditionnelle, lui donner plus ample profondeur afin de mieux lutter
contre le modernisme déliquescent. La "Sainte Alliance", qui
venait de vaincre Napoléon, héritier du fanatisme jacobin, devait se
donner des assises spirituelles, dépassant les clivages entre
Orthodoxes-Byzantins, Catholiques-Romains et Protestants par une
nouvelle synthèse religieuse, où la notion romantique d'"Amour"
occuperait la place centrale, mieux, en serait le noyau incandescent,
toujours actif comme un volcan. Le siècle à venir verrait se
dérouler une guerre civile philosophique comme les siècles
précédents avaient connu des guerres de religion. Pour von
Eckhartshausen, les adeptes de la "tolérance" sont en fait des
intolérants fanatiques et dangereux. Le recours visionnaire à des
forces religieuses occultées au fil des temps est la démarche qui
permettra de réfuter cette idéologie intolérante de la tolérance et
de contrer les manigances de ceux qui la manipulent.
1 juin 1981 : Décès à Milledgeville de Carl Vinson, homme politique
américain, né en 1883. Député au Congrès, il était surtout le
Président de la "House of Naval Affairs Committee", qui plaidait
pour un armement constant des Etats-Unis, qui devaient se tenir prêts
à intervenir partout dans le monde. On disait de lui qu'il contrôlait
le Pentagone tout entier depuis son fauteuil de député. Après Pearl
Harbor, c'est lui qui organisera le réarmement américain, demeurant
en place pendant de longues années. Il a travaillé étroitement avec
trois présidents américain : Roosevelt, Eisenhower et Johnson. Un
porte-avion nucléaire recevra son nom de son vivant. Il est la seule
personnalité à avoir bénéficié d'un tel honneur. Normal pour un
disciple sourcilleux de l'Amiral Alfred Thayer Mahan, père de la
puissance navale américaine, qui permet aux Etats-Unis de contrôler
le monde entier aujourd'hui.
1 juin 1954 : Mort à Hambourg de Wilhelm Stapel. Stapel a commencé sa
carrière au sein de la famille politique libérale en Allemagne, mais
dans la faction de celle-ci qui était animée par Friedrich Naumann,
c'est-à-dire la faction qui avait un sens social aigu et militait en
faveur d'un marché commun étendu à l'ensemble de la Mitteleuropa.
Cette version non manchestérienne du libéralisme allemand prendre une
coloration sociale-nationale, qui s'exprimait dans le "Dürerbund"
(= Fédération Dürer) de Ferdinand Avenarius. Plus tard, pour donner
corps à son engagement, Stapel s'occupe de la formation de la jeunesse
en milieu ouvrier. Il devient ensuite le rédacteur en chef de la revue
Deutsches Volkstum, où, dans les années 20, il développera une critique de la démocratie occidentale jugée trop formelle et
inorganique. Pour réaliser en Allemagne une démocratie idéale, il
faudrait une constitution présidentialiste (à la façon gaullienne
dirait-on, sans risquer de faire un anachronisme trop maladroit), un
mode de suffrage échelonné et une représentation corporatiste. Un
tel corpus n'avait aucune chance de s'ancrer dans les masses. Dans les
années 30, Stapel développe une "théologie" du nationalisme
allemand, lequel doit déboucher sur une vision impériale et non plus
simplement nationaliste. Ses relations avec le national-socialisme
seront assez conflictuelles, mais son système de pensée était trop
hétérogène par rapport au régime de 1949 pour qu'il ait vraiment
été réhabilité.
6 juin 1875 : Naissance à Lubeck de l'écrivain allemand Thomas Mann.
Armin Mohler le compte parmi les esprits fondateurs de la
"révolution conservatrice" pour ses écrits de guerre en 1914-1918
et pour ses "Considérations d'un apolitique", écrites de 1915 à
1918 et parues immédiatement avant la fin des hostilités, en octobre
1918. Thomas Mann y fustige l'esprit occidental, non organique, et lui
oppose une germanité plus respectueuse des ressorts organiques des
sociétés. Il s'inscrit ainsi dans un filon qui part d'Herder pour
passer par les romantiques, tout en rationalisant ses arguments. De
même, dans La Montagne magique (Der Zauberberg), certains de ses
personnages sont les exposants de ces idées allemandes, opposées au
rationalisme occidental.
11 juin 1974 : Mort à Rome de Julius Evola. Né en 1898, Evola
traversera le siècle en commençant sa carrière dans le mouvement
dada de Tzara, afin de faire le vide de toutes les niaiseries
modernistes, libérales et pseudo-démocratiques, vide qu'il remplira
et préconisera de remplir par la Tradition, par les voies
traditionnelles bouddhistes (doctrine de l'Eveil), par le Tao Te King
(qu'il traduira en italien), etc. Le passage d'Evola de l'avant-garde
insolente de dada à l'immersion profonde dans la Tradition a été
relativement long, avec une halte dans la philosophie stirnérienne et
nietzschéenne, c'est-à-dire le théorie de l'individu absolu. La
réception d'Evola à l'étranger est restée marquée par les
épisodes de sa vie au temps du fascisme italien. Ce marquage condamne
à une approche insuffisante de son uvre. Il faut être capable de le
transcender. Il s'avère plus que jamais nécessaire de réétudier à
fond cette phase de transition dans la vie d'Evola. Les recherches qui
s'effectuent aujourd'hui en Italie vont dans ce sens. Et mériteraient
d'être traduites et explicitées pour le public non italophone.
12 juin 1981 : Décès au Caire de Mahmoud Fawzi qui fut Ministre des Affaires Etrangères de l'Egypte sous Gamal Abdel Nasser, puis Premier Ministre de 1970 à 1972. Ce juriste polyglotte formé en Angleterre, aux Etats-Unis et en Italie a été l'un des plus brillants diplomates de l'Egypte indépendante, à une période difficile de son histoire, où son refus de l'alignement lui valait l'hostilité des chancelleries
occidentales.
12 juin 1982 : Mort à Hambourg de l'historien allemand Otto Brunner,né et formé à Vienne. Il effectuera une bonne part de ses recherches sous les auspices de l'Académie des Sciences d'Autriche. Sa
spécialisation première a été l'histoire économique. De cette
position initiale, il est rapidement passé à l'histoire du droit et
du droit constitutionnel médiéval. Les acquis de sa recherche lui
font conclure que la conception bourgeoise et libérale de l'Etat, qui
se cristallise au 19ième siècle, est erronée, trop axée sur les
lois et les règlements, c'est-à-dire sur de purs expédients
provisoires que l'on hisse au rang de vérités éternelles et
intangibles. Le droit médiéval laisse une place aux forces
"supra-légales", intangibles, véritable fond ontologique de
l'humanité européenne, et c'est une institution terrible comme la
"Fehde" qui doit réparer les entorses faites, le cas échéant, à
ce socle ontologique indéfinissable parce que vivant. Finalement,
Brunner se rend compte que les concepts modernes d'Etat, de société
et de culture constituent un rejet impossible de ce socle ontologique.
Ils doivent dès lors faire place à des concepts plus vivants et plus
fluides, tels le Peuple (Volk), le Reich et le pays (Land). Brunner
remet ensuite l'histoire européenne en perspective, dans la mesure où
il voit l'apogée de cette Europe, la pleine adéquation de celle-ci à
son socle ontologique, entre 1200 et 1800. Après, sous les coups de la
modernité, qui oblitère puis étouffe et tue la vigueur ontologique
de la "Vieille Europe", commence le déclin inexorable de notre
monde et de notre culture. Tout ce qui est "durée",
"continuité" et "valeur" (axiologique) disparaît au profit de
pures contingences temporelles. En fin de compte, concluait-il, nous
n'avons plus de réponses à nos questions, mais nous ne pouvons pas
cesser notre questionnement, faute de nous trouver face à un terrible
néant.
14 juin 1888 : Naissance à Bentwisch en Allemagne du théologien Emanuel Hirsch, qui avait eu la volonté de germaniser le christianisme. Il a été aussi le traducteur de toute l'oeuvre du
Danois Kierkegaard. On ne le confondra pas avec l'écrivain Hermann Hirsch, qui appartenait au mouvement religieux de la "foi allemande". C'est donc sur base d'une connaissance profonde de la pensée de Kierkegaard et aussi de celle de Fichte (auquel il consacre un maître-ouvrage en 1914) qu'il développera sa théologie "germanique", une théologie impliquant une éthique très exigeante de l'obéissance, diamétralement opposée aux idées de Tolstoï. La théologie ne peut être séparée de l'histoire réelle du peuple,
laquelle histoire doit être aimée et c'est cet amour qui doit
conduire au salut de tous dans la patrie. La théologie, pensait
Hirsch, ne saurait s'identifier à des prophéties vagues, trop
critiques vis-à-vis des traditions, détachées de l'histoire réelle,
sinon elle s'avère incapable de susciter des vocations efficientes et
d'agir sur la communauté des croyants.
14 juin 1936 : Mort à Londres de Gilbert Keith Chesterton, écrivain et journaliste anglais. Né dans une famille anglicane, où la religion n'avait guère d'importance, il lit dans sa jeunesse les oeuvres de Thomas d'Aquin et du Cardinal Newman, épouse une femme dont la famille appartient aux plus conservateurs des Anglicans, les Anglocatholics, puis devient catholique à son tour, car l'esprit anglo-saxon, estimait-il, reposait sur l'arbitraire du subjectivisme, revenait à faire de l'art pour l'art, à rejeter toutes les lois qui donnent socle aux actions humaines, à laisser libre cours à des tempéraments délirants ou anarchiques.
Chesterton défend ses positions par des
arguments théologiques ou philosophiques solides, mais aussi par
l'humour et la moquerie. Sur le plan politique, il commence par être
un simple libéral de gauche avec des sympathies pour les socialistes.
Mais cette posture lui apparaît bien vite insuffisante, car il voit
tout de suite que derrière les vocables pompeux d'humanisme, de
justice sociale, etc. se cache une inhumanité foncière, une
méchanceté diabolique, une perversité sans nom. Ce libéralisme
hisse les mensonges, ses impostures, au rang de dogmes intangibles.
Dans une telle perspective, la Tradition, pour Chesterton, n'est pas un
musée, que l'on visite de temps à autre par meubler son oisiveté,
mais un réceptacle hautement respectable d'orientations fructueuses
pour l'âme et pour la vie quotidienne. La Tradition nous donne non
seulement les recettes de la sagesse, mais elle nous livre aussi les
linéaments permanents de la volonté populaire. Chesterton a répandu
sur la tête des bien-pensants libéraux sarcasmes et jets cinglants
d'ironie, pour fustiger leur forfanterie. Au-delà d'un catholicisme,
compréhensible dans une société anglo-saxonne parce qu'il constitue
une position antagoniste, Chesterton nous apprend à rire aux éclats
des poncifs qui sous-tendent aujourd'hui la pensée unique et qui
sévissaient déjà de son temps.
18 juin 1903 : Naissance à Idar-Oberstein d'Ernst Rudolf Huber, professeur de droit politique général et de droit administratif.
Disciple de Carl Schmitt, Huber se spécialisera dans les problèmes constitutionnels et tentera de jeter les bases d'un modèle constitutionnel adéquat pour l'Allemagne, en tenant compte des facteurs économiques, historiques et militaires.
En 1939 paraît une première ébauche de constitution. En 1940, il analyse les crises institutionnelles et constitutionnelles du Deuxième Reich de Bismarck.
En 1943, il démontre que l'armée, que le facteur militaire, a toujours été déterminant dans l'histoire politique allemande.
Après 1945, alors qu'il est professeur à Wilhelmshaven dans le Nord de l'Allemagne, il publie en 1957 une vaste histoire constitutionnelle de
l'Allemagne depuis 1789, ouvrage de référence toujours actuel. Huber
demeure un auteur très important en matières de droit et peut encore
servir d'inspirateur pour une constitution européenne conforme aux
traditions juridiques romaines et germaniques, afin de se débarrasser
des schématismes libéraux qui affaiblissent l'Europe depuis plus de
deux siècles.
22 juin 1981 : Mort à Stockholm en Suède de Zarah Stina Leander,
chanteuse et actrice suédoise, qui fit essentiellement carrière à
Berlin entre 1936 et 1943. Sa voix a enchanté tous les soldats de la
deuxième guerre mondiale, à commencer par les Allemands, grâce à sa
chanson à grand succès, Lili Marlene. Immédiatement traduite en
anglais, cette chanson est adoptée par les troupes américaines et
britanniques. Il en existe aussi une version française. Après une
éclipse de quelques années, dues à la chute du Troisième Reich,
Zarah Leander retrouve toute sa popularité dans sa patrie d'origine.
23 juin 1904 : Naissance à Wakefield dans le Massachusetts de l'anthropologue américain Carleton Stevens Coon.
Sa méthode consistait à émettre des thèses en anthropologie sur base d'un matériel archéologique. Son oeuvre majeure a été The Origin of Races (1962), ouvrage controversée à une époque où les études anthropologiques sont systématiquement soupçonnées de consolider un discours "raciste". L'investigation minutieuse des preuves
archéologiques ne peut pourtant pas se réduire à des slogans ineptes, que ceux-ci soient de facture "raciste" ou "anti-raciste".
L'hystérie de ses contradicteurs ne remplacera évidemment jamais le fait qu'il ait examiné plus de 31.000 outils, fragments d'outils ou
récipients destinés à l'agriculture, dont certains remontaient à
6050 av. J. C. et provenaient de la grotte de Hotu en Iran. Ce chantier
archéologique permettait, grâce à sa bonne conservation, d'explorer
plusieurs strates successives de l'évolution préhistorique et
proto-historique, allant du néolithique à l'Age du Fer en passant par
l'Age du Bronze. Mieux, Coon y découvrit des restes humains de l'ère
glaciaire, dont l'examen lui permit d'écrire, en 1954, The Story of
Mankind (= L'histoire de l'humanité), panorama de l'histoire humaine
depuis l'ère glaciaire jusqu'aux temps modernes. Pour Coon, cinq
souches humaines existaient avant l'apparition de l'homo sapiens. Il a
donc été l'avocat de la théorie polygéniste, opposée à la
théorie monogéniste, propre de ceux qui interprètent la Bible
stricto sensu et appartiennent généralement aux sectes protestantes
les plus rétrogrades et propre aussi des "anti-racistes"
professionnels qui se piquent d'un progressisme plus religieux que
scientifique. Parmi les autres ouvrages majeurs de Coon, citons The
Tribes of the Rif (= Les tribus du Rif, 1931) et The Races of Europe
(1939). Carleton Stevens Coon meurt le 3 juin 1981 à Gloucester dans
le Massachusetts.
28 juin 1752 : Naissance à Haimhausen près de Dachau en Bavière de
Karl von Eckhartshausen, figure de proue du Royaume de Bavière.
Pendant un bref laps de temps, il fit partie de l'Ordre des Illuminés
de Bavière, dont il fut exclu. Il se rendit parfaitement compte du
caractère utopique et pernicieux de cet Ordre qui entendait faire du
passé table rase. Après cette aventure, il uvra à faire interdire
les sectes politiques de cet acabit en Bavière. Karl von
Eckhartshausen entame alors un véritable Kulturkampf contre les idées
illuministes et libérales qui ne peuvent induire que des bacilles de
décadence et ruiner en ultime instance les institutions politiques
traditionnelles. Mais la lutte contre l'illuminisme bavarois ou autre
passe par un approfondissement de la religion, y compris de ces
facettes occultes, et ne doit pas se contenter de reproduire la
religion telle qu'elle est. Cette position le rapproche du Tsar
Alexandre I de Russie qui entendait, lui aussi, approfondir la religion
traditionnelle, lui donner plus ample profondeur afin de mieux lutter
contre le modernisme déliquescent. La "Sainte Alliance", qui
venait de vaincre Napoléon, héritier du fanatisme jacobin, devait se
donner des assises spirituelles, dépassant les clivages entre
Orthodoxes-Byzantins, Catholiques-Romains et Protestants par une
nouvelle synthèse religieuse, où la notion romantique d'"Amour"
occuperait la place centrale, mieux, en serait le noyau incandescent,
toujours actif comme un volcan. Le siècle à venir verrait se
dérouler une guerre civile philosophique comme les siècles
précédents avaient connu des guerres de religion. Pour von
Eckhartshausen, les adeptes de la "tolérance" sont en fait des
intolérants fanatiques et dangereux. Le recours visionnaire à des
forces religieuses occultées au fil des temps est la démarche qui
permettra de réfuter cette idéologie intolérante de la tolérance et
de contrer les manigances de ceux qui la manipulent.
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