Hannah Arendt face à la gauche

 

Hannah Arendt face à la gauche

Dans une très lon­gue étude intitulée «Hannah Arendt bei den Linken», Ernst Vollrath, professeur de philosophie, étudie en détail la confrontation entre Hannah Arendt et les gauches alle­man­des, qui la rejetaient, parce qu'elles la considéraient com­me une “adepte de la guerre froide”. Cependant, il rend justice au jeune Habermas, qui, dès 1961, souligne l'impor­tan­ce du livre d'Arendt, Vita activa. Arendt y fait la dif­férence entre "Technique" et "Praxis", à l'instar d'Aristote, ce qui permet à Habermas de forger les concepts qui le ren­­dront célèbre: l'agir stratégique-instrumental et l'agir com­municationnel, avatars de la technique et de la praxis. Vollrath fait également une longue parenthèse sur la ré­ception d'Arendt et sur la critique du totalitarisme en Fran­ce. Il souligne que le fondement de la démarche de Hannah Arendt réside dans sa conception holiste du politique, qui entend mettre la “société civile”, expression de la vie, à l'a­bri des démarches aliénantes de la sphère politicienne. D'où l'émergence de deux concepts du politique: l'un cher­chant la mobilisation de tous dans les appareils partisans in­vestissant l'Etat, l'autre cherchant plus simplement à as­su­rer l'indépendance de la société civile, l'autonomie de son fonctionnement et, partant, la liberté des citoyens. C'est au fond une distinction qui remonte au 17ième siècle, entre la pensée coercitive de Bodin, ramenant tous les res­sorts de la société à l'ap­pareil étatique désincarné et les pla­çant d'autorité sous son contrôle absolu, et les pensées di­tes “sym­bio­ti­ques”, dont l'œuvre d'Althusius constitue le pa­radigme in­dé­passable. Le “symbiotisme” qui court d'Al­thu­sius à Ferdinand Tönnies et aux communautariens amé­ricains contemporains, permet une praxis, qui est implicite­ment un “agir communicationnel”, naturel et non pas con­struit, qui n'a nul besoin de dire son nom, ni de se parer d'un vocable savant et prétentieux, qui fait les délices des au­todidactes complexés et obséquieux (Robert Steuckers).

Ernst Vollrath: «Hannah Arendt bei den Linken»:
http://www.nakayama.org/polylogos/philosophers/ar...

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