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Robert Steuckers
HALFORD JOHN MACKINDER
1861-1947
Né
à Gainsborough dans le Lincolnshire le 15 février 1861, Halford John
Mackinder se sentira attiré par les études géographiques dès son plus
jeune âge. Formé à l'Epsom College, puis, à partir de 1880, à Oxford, il
étudie successivement la biologie (sous la direction de H.N. Moseley,
un anatomiste s'inscrivant dans le sillage de Darwin et de Huxley),
l'histoire, la géologie et le droit. Il sera reçu au barreau de Inner
Temple en 1886, après avoir acquis une expérience en droit maritime,
c'est-à-dire, à ses yeux, la branche du droit la plus proche de la
géographie. De 1887 à 1905, il enseigne la géographie à Oxford,
notamment dans le cadre de la Oxford University Extension, qui
prodiguait un enseignement itinérant, ouvert à tous mais plus
particulièrement aux instituteurs et aux enseignants des écoles
secondaires.
La
géographie était, à l'époque, une discipline négligée dans le monde
universitaire britannique. Depuis le XVIième siècle, au temps où
enseignait le géographe Richard Hakluyt, plus aucune chaire de
géographie n'avait été attribuée à Oxford. Mackinder a donc été le
premier successeur de Hakluyt, après une parenthèse de quatre siècles.
L'objectif premier de Mackinder était de réhabiliter la géographie aux
yeux du monde académique britannique en suivant l'exemple allemand
(Ritter, Richthofen, Ratzel). Pour réaliser cette tâche, il reçut
l'appui de Sir John Scott Keltie, qui avait ramené d'Allemagne une
collection impressionnante de matériels didactiques (cartes, atlas,
etc.), puis de la Royal Geographical Society.
Entre
1892 et 1903, il sera le directeur du University College de Reading,
une université qu'il créera presque de toutes pièces. De 1903 à 1908,
Mackinder est directeur de la London School of Economics and Political
Sciences, où il avait commencé à enseigner dès 1895. En 1899, il avait
été nommé directeur de l'école de géographie d'Oxford. La même année, il
s'embarque pour l'Afrique afin d'explorer les abords du Kilimanjaro au
Kenya et l'escalader. A son retour, il entame une carrière politique
dans les rangs des "libéraux-impérialistes". Cette carrière ne lui
rapportera un siège aux Communes, celui de Glasgow, qu'en 1910 et qu'il
conservera jusqu'en 1922. Les "libéraux-impérialistes" soutenaient la
politique impériale britannique mais souhaitaient des réformes sociales.
Leur chef de file était Lord Rosebery et, parmi leurs membres les plus
illustres, on a compté Haldane, Grey et Asquith. Mais, quand le 15 mai
1903, Joseph Chamberlain renonce officiellement à la politique de
libre-échange libérale au profit d'une politique tarifaire
préférentielle autarcisante, interne à l'Empire, de façon à fermer
celui-ci aux concurrences américaine et allemande, les
"libéraux-impérialistes" se scindent en deux groupes: ceux qui donnent
la préséance au libéralisme économique et ceux qui accordent davantage
d'importance à la consolidation de l'Empire en tant qu'entité politique
homogène. Mackinder rejoint les seconds, plus sensibles aux
argumentations d'ordre géopolitique (parmi eux: Hewins, Amery, Maxse).
Il rejoint par la suite les Unionistes, puis les Conservateurs. En 1904,
Mackinder amorce ses réflexions géopolitiques proprement dites en
rédigeant un texte très important sur le "pivot géographique de
l'histoire", c'est-à-dire le fameux heartland, la "Terre du Milieu",
inaccessible aux instruments de mobilité dont dispose la puissance
thalassocratique britannique: les navires de guerre et leurs canons à
longue portée, les fameux dreadnoughts.
A
partir de 1906, Mackinder, sous l'impulsion de Haldane devenu Secrétaire
d'Etat à la Guerre, commence à dispenser ses cours aux officiers
d'état-major. En 1908, il accompagne le Prince de Galles au Canada et en
revient convaincu de l'impérieuse nécessité d'appliquer les tarifs
préférentiels dans le domaine céréalier en Amérique du Nord, de façon à
ce que le dominion du Canada ne soit pas absorbé par la puissance
montante des Etats-Unis. Une absorption du Canada signifierait la
création d'un grand espace nord-américain autonome, capable de se
substituer à l'Angleterre comme première puissance maritime du globe.
La
guerre mondiale accentue sa germanophobie, latente depuis la politique
maritime du Kaiser, commencée pendant la dernière décennie du XIXième
siècle. Dans le débat sur la décentralisation des institutions en
Grande-Bretagne, qui reprend en 1919, Mackinder suggère un plan de
partition de l'Angleterre en trois régions, de façon à obtenir des
entités égales en dimensions et en poids démographique.
La
même année, paraît à l'attention des diplomates qui négocient à
Versailles, un ouvrage incisif et capital, concis comme tous les
ouvrages de base de la discipline géopolitique: Democratic Ideals and
Reality. Mackinder y remet en exergue l'importance du territoire russe,
masse continentale compacte impossible à contrôler depuis la mer et à
envahir complètement.
Ce
petit livre attire l'attention des diplomates du Foreign Office: Lord
Curzon nomme Mackinder Haut Commissaire britannique en "Russie du Sud",
où une mission militaire anglaise appuyait les Blancs de Denikine.
Ceux-ci reculent. Les Britanniques les obligent à reconnaître de facto
la nouvelle république ukrainienne et à forger une alliance entre
Blancs, Polonais, Bulgares et Ukrainiens contre les Rouges. Cette
ébauche d'alliance jette les bases du fameux "cordon sanitaire", destiné
à séparer les Allemands des Russes et à empêcher l'union de la "Terre
du Milieu" sous la double impulsion du génie technique germanique et de
la "brutalité élémentaire" des Bolchéviks.
Mackinder,
en élaborant cette stratégie, crée la politique anglo-saxonne de
containment, reprise plus tard par les Américains. Les puissances
thalassocratiques anglo-saxonnes doivent tout mettre en oeuvre, explique
Mackinder, pour empêcher l'unification eurasienne sous la double égide
allemande et russe. Pour parvenir à cet objectif, il faut balkaniser
l'Europe orientale, priver la Russie de son glacis baltique et
ukrainien, empêcher la domination d'une et une seule alliance sur les
mers intérieures (Mer Baltique et Mer Noire), contenir la Russie et le
bolchévisme en Asie de façon à ce que les peuples cavaliers de la steppe
ne puissent pas débouler en Perse et en Inde, zones d'influence
britanniques.
La
leçon sera aussitôt retenue mais inversée par les géopoliticiens
(l'école de Haushofer) et les diplomates allemands (von Seeckt, Groener,
Rathenau, von Brockdorff-Rantzau) et par les idéologues
nationaux-révolutionnaires et nationaux-bolchéviques (Niekisch, Paetel,
Schauwecker, les frères Jünger, Hielscher, etc.), tous partisans d'une
alliance germano-russe dirigée contre les thalassocraties et le
capitalisme anglo-saxons.
Plus
tard, après la seconde guerre mondiale, les principes de Mackinder,
soit organiser les rimlands (les zones littorales bordant la "Terre du
Milieu") pour contenir les forces issues du heartland (la "Terre du
Milieu"), seront instrumentalisés par les Américains, qui entoureront
l'URSS et la Chine d'un réseau d'alliances défensives et "contenantes"
(OTAN, OTASE, ANZUS, CENTO). Sous Reagan, l'idéologie est remise au goût
du jour pas Colin S. Gray. Mackinder meurt à l'âge de 86 ans à
Bournemouth le 6 mars 1947.
Les Iles Britanniques et les mers britanniques (Britain and the British Isles) 1902
Livre
de géographie pure, cet ouvrage consiste en une exploration méthodique
de la géologie des Iles Britanniques. Le sol britannique est né de
plissements géologiques successifs et d'un abaissement du niveau de
l'Océan. Résultat: les Iles Britanniques sont reliés au Continent pas le
promontoire du Kent, le Pas-de-Calais et l'estuaire de la Tamise; la
Manche permet à un courant chaud, le Gulf Stream de réchauffer le
climat et de libérer les eaux des glaces en hiver. Le Nord-Est de la
grande île est ouvert aux influences venues de la Scandinavie et de la
zone baltique. Le Sud-Est, situé juste en face de la frontière
linguistique entre langues romanes et langues germaniques, reçoit les
influences venues d'Europe centrale par le Rhin et celles venues du Midi
méditerranéen et hispanique.
Géologiquement,
les Iles Britanniques ont été formées par des terrains ayant glissés le
long d'un axe nord-ouest. Politiquement, le Royaume-Uni s'est formé à
partir du promontoire du Kent, situé dans le Sud-Est. Historiquement, la
communauté britannique est passée d'une dépendance européenne, due au
poids du Sud-Est, à une maîtrise du large, affranchie de l'Europe, qui a
permis le peuplement britannique de l'Amérique du Nord. Terminus de
beaucoup d'invasions venues d'Europe, les Iles Britanniques ont été le
tremplin du peuplement multi-ethnique de l'Amérique du Nord. Les Iles
Britanniques sont donc à la fois la pointe terminale du Vieux Monde et
l'amorce du Nouveau Monde. L'addition de ces deux qualités a donné à
l'Angleterre du XIXième siècle un maximum de puissance.
Dans
sa conclusion, Mackinder écrit que cette position dominante ne sera pas
éternelle car de nouvelles puissances sont en train de s'organiser sur
de vastes étendues continentales, dotées d'immenses ressources. Pour
conserver une position honorable, l'Angleterre doit organiser
méthodiquement son empire, de façon à bénéficier d'autant de ressources
que les puissances continentales montantes et permettre à ses dominions
de disposer d'une flotte, de façon à ce qu'elles puissent, de concert,
damer le pion des challengeurs (allemands et russes).
Le pivot géographique de l'histoire (The Geographical Pivot of History) 1904
Article
paru dans le Geographical Journal en 1904, ce texte capital contient
toute la pensée géopolitique de Mackinder. Pour ce dernier, à l'aube du
siècle, l'Europe vivait la fin de l'âge colombien, qui avait vu
l'expansion européenne sur tout le globe, sans résistance sérieuse de la
part des autres peuples. A cette ère d'expansion succèdera l'âge
postcolombien, caractérisé par un monde désormais fermé dans lequel
"chaque explosion de forces sociales, au lieu d'être dissipée dans un
circuit périphérique d'espaces inconnus, marqués du chaos du barbarisme,
se répercutera avec violence depuis les coins les plus reculés du
globe, si bien que les éléments les plus faibles au sein des organismes
politiques du monde seront ébranlés en conséquence".
Mackinder, en
écrivant ces phrases prophétiques, demandait à ses lecteurs de se
débarrasser de leur européocentrisme et de considérer que toute
l'histoire européenne dépendait de l'histoire des immensités
continentales asiatiques. La perspective historique de demain,
écrivait-il, sera "eurasienne" et non plus confinée à la seule histoire
des espaces carolingien et britannique.
Pour
étayer son argumentation, Mackinder esquisse une géographie physique de
la Russie, ce qui le conduit à constater que l'histoire russe est
déterminée par deux types de végétation, la steppe et la forêt. Les
Slaves ont élu domicile dans les forêts tandis que les peuples de
cavaliers nomades règnaient sur les espaces déboisés des steppes
centre-asiatiques. A cette mobilité des cavaliers, se déployant sur un
axe est-ouest, s'ajoute une mobilité nord-sud, prenant pour pivots les
fleuves de la Russie d'Europe. Ces fleuves ont été empruntés par les
guerriers et les marchands scandinaves qui ont créé l'empire russe et
donné leur nom au pays. La steppe centre-asiatique, zone de départ des
mouvements des peuples-cavaliers, est la "Terre du Milieu", entourée de
deux zones en "croissant": le croissant intérieur (inner crescent) qui
la jouxte territorialement et le croissant extérieur (outer crescent),
constitué d'îles de diverses grandeurs. Ces "croissants" sont
caractérisés par une forte densité de population, au contraire de la
Terre du Milieu. L'Inde, la Chine, le Japon et l'Europe sont des parties
du croissant intérieur qui, à certains moments de l'histoire, subissent
la pression des nomades cavaliers venus des steppes de la Terre du
Milieu. Telle a été la dynamique de l'histoire eurasienne à l'ère
pré-colombienne et partiellement aussi à l'ère colombienne où les Russes
ont progressé en Asie Centrale.
Cette
dynamique perd de sa vigueur au moment où les peuples européens se
dotent d'une mobilité navale, inaugurant ainsi la période proprement
"colombienne". Les terres des peuples insulaires comme les Anglais et
les Japonais et celles des peuples des "nouvelles Europes" d'Amérique,
d'Afrique australe et d'Australie deviennent des bastions de la
puissance navale inaccessibles aux coups des cavaliers de la steppe.
Deux mobilités vont dès lors s'affronter, mais pas immédiatement: en
effet, au moment où l'Angleterre, sous les Tudor, amorce la conquête des
océans, la Russie s'étend inexorablement en Sibérie. A cause des
différences entre ces deux mouvements, un fossé idéologique et
technologique va se creuser entre l'Est et l'Ouest, dit Mackinder. Il
écrit: "C'est sans doute l'une des coïncidences les plus frappantes de
l'histoire européenne que la double expansion continentale et maritime
de cette Europe recoupe, en un certain sens, l'antique opposition entre
Rome et la Grèce... Le Germain a été civilisé et christianisé par le
Romain; le Slave l'a été principalement par le Grec. Le Romano-Germain,
plus tard, s'est embarqué sur l'océan; le Greco-Slave, lui, a parcouru
les steppes à cheval et a conquis le pays touranien.
En
conséquence, la puissance continentale moderne diffère de la puissance
maritime non seulement sur le plan de ses idéaux mais aussi sur le plan
matériel, celui des moyens de mobilité". Pour Mackinder, l'histoire
européenne est bel et bien un avatar du schisme entre l'Empire
d'Occident et l'Empire d'Orient (an 395), répété en 1054 lors du Grand
Schisme opposant Rome à Byzance. La dernière croisade fut menée contre
Constantinople et non contre les Turcs. Quand ceux-ci s'emparent en 1453
de Constantinople, Moscou reprend le flambeau de la chrétienté
orthodoxe. De là, l'anti-occidentalisme des Russes. Dès le XVIIième
siècle, un certain Kridjanitch glorifie l'âme russe supérieure à l'âme
corrompue des Occidentaux et rappelle avec beaucoup d'insistance que
jamais la Russie n'a courbé le chef devant les aigles romaines. Plus
tard, Mackinder dira que la Russie a choisi le communisme parce que ses
réflexes religieux étaient collectifs, tandis que l'Ouest a opté pour le
capitalisme parce que ses religions évoquent sans cesse le salut
individuel. Le chemin de fer accélerera le transport sur terre, écrit
Mackinder, et permettra à la Russie, maîtresse de la Terre du Milieu
sibérienne, de développer un empire industriel entièrement autonome,
fermé au commerce des nations thalassocratiques. L'antagonisme
Terre/Mer, héritier de l'antagonisme religieux et philosophique
Rome/Byzance, risque alors de basculer en faveur de la terre, russe en
l'occurrence.
Idéaux démocratiques et réalité (Democratic Ideals and Reality) 1919
Ouvrage
de base de la géopolitique anglo-saxonne, Democratic Ideals and Reality
part d'un constat: les guerres sont les cataractes du fleuve de
l'histoire; elles sont le résultat, direct ou indirect, de la croissance
inégale des nations. Cette croissance inégale est due à l'inégale
distribution des terres fertiles et des atouts stratégiques entre les
nations. Face à cette inégalité incontournable, l'idéalisme
démocratique connaît des tragédies successives: il retombe toujours,
tarabusté, à pieds joints dans la réalité par l'impulsion de grands
organisateurs (Napoléon après 1789, Bismarck après 1848). Dans ce
constat, posé par Mackinder, on retrouve la marque de Hobbes: le
Léviathan gère le réel en limitant le zèle libertaire, en refroidissant
les espoirs extatiques d'aboutir à une liberté illimitée et définitive.
Grâce au travail politique, au modelage de léviathans, la liberté
s'ancre dans de "bonnes habitudes". C'est pourquoi la pensée des grands
organisateurs est essentiellement stratégique tandis que celle des purs
démocrates est éthique. Bismarck, que Mackinder, pourtant germanophobe,
admire beaucoup, a été supérieur à Napoléon. Il a réussi son travail
d'organisateur/unificateur en ne menant que de petites guerres
périphériques contre le Danemark pour acquérir la position de Kiel et
contre l'Autriche-Hongrie pour asseoir la prééminence de la Prusse dans
le monde germanique. Bismarck a été plus psychologue que Napoléon: il
n'a jamais accepté les annexions susceptibles de froisser l'ancien
adversaire. Il a refusé d'annexer la Bohème après Sadowa et c'est à
contre-coeur qu'il a dû accepter, sous la pression des militaires, la
réincorporation de l'Alsace et de la Lorraine thioise dans le Reich.
Bismarck se disait qu'il allait avoir besoin, plus tard, de l'alliance
autrichienne et du concours de la France. Bismarck a réussi ainsi une
politique d'équilibre inégalée, en fâchant la France contre l'Angleterre
et celle-ci contre la Russie. Avec Bismarck, explique Mackinder, il n'y
aurait pas eu 1914, ou la crise d'août 1914 n'aurait été qu'un orage
passager.
Cette
faculté d'organiser, d'harmoniser et d'équilibrer provient de la Kultur allemande, dont l'essence est stratégique, dynamique et dialectique.
C'est une leçon que l'esprit allemand-prussien a retenu de la défaite
d'Iéna: la belle mécanique du despotisme éclairé s'était effondrée
devant le dynamisme révolutionnaire français. La France, pays
d'artistes, est la terre de l'idéalisme (Mackinder donne au terme
"idéalisme" le sens de "non réaliste"), qui offre l'enthousiasme mais
non l'endurance. Fichte est le philosophe qui a su doser correctement
idéalisme et organicisme, souci du détail et sens de l'organisation dans
la pensée allemande et dans l'appareil prussien brisé par Napoléon.
Pour répondre à la France et au militarisme bonapartiste, les Prussiens,
galvanisés par les discours et la pensée de Fichte, ont repensé le
service militaire universel, ont imposé l'éducation obligatoire pour
tous et fusionné l'université avec l'état-major (ce est vrai pour la
géographie puisque Carl Ritter enseignait à la fois à l'Université de
Berlin et à l'Ecole de guerre).
En
Prusse, cette collusion de l'université et de l'armée a permis
d'élaborer une géographie pratique redoutable qui permettait aux
diplomates, aux négociants et aux militaires de visualiser le monde et
de voir en idée les axes possibles de développement économique ou les
opportunités de man¦uvre qu'offre le terrain. C'est ainsi que la
géographie prussienne a permit l'éclosion d'une intuition géostratégique
très efficace et vu ce que rapporterait un renforcement des
communications par air, fer et eau entre Berlin et Bagdad, Berlin et
Hérat, Berlin et Pékin. Trois générations de Prussiens se sont essayés à
ce Kriegspiel sur carte, crayon en main. C'est ce qui explique les
succès de la politique commerciale allemande avant 1914.
Mackinder
conclut: l'Allemagne produit une pensée qui pense la vie en détail; la
Grande-Bretagne produit, elle, une pensée absorbée par le principe
négatif du "laisser-vivre". C'est ce qui a conduit Guillaume II à dire:
"1914 est une guerre entre deux visions du monde". L'utilisation du mot
"vision" implique "voir de haut", comme le géographe regarde le monde et
le met en cartes. C'est, dit Mackinder admiratif, une vision
d'"organisateur". Le conflit qui vient de se dérouler oppose
l'idéaliste, qui refuse la stratégie et l'action dans un but précis, et
l'organisateur, qui planifie puis observe et analyse le réel, comme
l'architecte trace son ébauche et tient compte de la résistance des
matériaux. Pour sauver la démocratie de mouture anglo-saxonne, il faut
donc se donner une stratégie à la mode prussienne et devenir
"organisateur".
Dans
un second chapitre, Mackinder explique comment le marin voit le monde.
Pour lui, la première réalité géographique, c'est l'unité de l'océan,
fait que Mahan avait déjà mis en exergue. L'océan est aujourd'hui une
unité connue et close comme le Nil était une unité connue et fermée pour
les Egyptiens et comme la Méditerranée l'était pour les Romains.
L'Italie s'est transformée au cours des Guerres Puniques en base navale.
Elle a d'abord conquis le bassin occidental de la Méditerranée puis le
bassin oriental. Dès l'achèvement de cette clôture, Rome est redevenue
une puissance militaire essentiellement terrestre. L'objet de la Guerre
des Gaules a été d'empêcher le rassemblement d'une flotte ennemie de
Rome dans le Golfe de Gascogne, la Manche et la Mer du Nord, qui aurait
pu pénétrer par Gibraltar dans le bassin occidental de la Méditerranée.
La défaite navale des Veneti (côte sud de l'Armorique) et le
débarquement de César en Grande-Bretagne sont les événements les plus
saillants de cette campagne, aux yeux du marin contemporain. Sans
s'attarder sur les tentatives de Carausius, des Saxons et du Vandale
Genséric, Mackinder démontre que les Normands réalisent ce que César a
empêché: ils ferment à leur profit la Mer du Nord, contrôlent la côte
atlantique jusqu'au Cap Saint Vincent, pénètrent en Méditerranée
occidentale et, plus tard, conquièrent la Sicile et Malte. Les Sarazins,
nomades dont les instruments de mobilité sont le cheval et le chameau,
s'emparent de la Sicile et de l'Espagne mais non des voies maritimes qui
restent aux mains des Normands. La Méditerranée se transforme en douve,
en barrière séparant deux mondes hostiles. Dans ce cadre naissent les
cinq grands "royaumes" héritiers de Rome et de Charlemagne (Angleterre,
Allemagne, France, Italie, Espagne). Mackinder regrette la décision
romaine de ne pas avoir entrepris la conquête et la latinisation de la
Germanie, auquel cas l'Europe aurait été unifiée, serait devenue une
péninsule homogène ouverte sur le monde. La logique de l'histoire
romaine a été de contenir les Germains au-delà de la ligne Rhin/Danube.
Cette logique était méditerranéenne et non européenne. L'Europe est un
promontoire eurasien fermé au Nord (Arctique), à l'Est (steppe; à
l'exception de la trouée mésopotamienne, route des caravanes,
verrouillée par les Arabes puis les Turcs) et au Sud (désert saharien)
mais ouvert à l'Ouest (Atlantique). Les Portugais ont été les pionniers
du renouveau européen: ils ont contourné les Arabes par le Cap et ont
surgi dans leurs dos, dans l'Océan Indien. Ils inauguraient de la sorte
l'ère de la domination du marin européen sur les "continentaux"
africains et asiatiques. Le rôle de l'Angleterre, seule base navale
européenne isolée et sans ennemis immédiats à ses frontières, a été de
participer à l'aventure à la suite des Portugais, puis, à partir de
Trafalgar, d'envelopper la péninsule ibérique comme l'avaient fait les
Normands et de contrôler les deux bassins de la Méditerranée pour
maîtriser la route des Indes dès l'ouverture du Canal de Suez.
En bout
de course, l'Angleterre ferme l'Océan Indien comme Rome avait fermé la
Méditerranée: l'Inde, pièce centrale, y est devenue son Italie. La seule
menace qui pesait sur cet Océan Indien, devenu mer britannique, était
l'installation d'une base navale non britannique au fond du Golfe
Persique, relié au coeur de l'Europe par chemin de fer et par voie
fluviale (Danube). Si Trafalgar a donné à l'Angleterre la faculté d'être
ubiquitaire, de débarquer des troupes partout, la clef de sa puissance
réside dans la division de l'ex-oekoumène latin/carolingien entre
plusieurs puissances antagonistes. La capacité navale d'envelopper toute
la péninsule gallo-hispanique a donné la victoire aux
Franco-Britanniques en 1918. Mais les Etats-Unis, depuis la guerre de
1898 qui les a opposés à l'Espagne dans les Caraïbes et le Pacifique,
sont en train de devenir une puissance maritime égale sinon supérieure à
l'Angleterre, vu l'inaccessibilité de leurs bases navales
métropolitaines, situées dans le Nouveau Monde panaméricain transformé
en île. Mais si l'Allemagne avait vaincu, elle aurait transformé, grâce à
son alliance avec les Ottomans et le retournement des Russes,
l'Eurasie/Afrique en une île gigantesque, que Mackinder appelle la World
Island. Cette île aurait de surcroît été organisée par un réseau
interne de chemin de fer, accentuant à l'extrême la mobilité sur terre.
Les Etats-Unis croient qu'ils lieront leur sort à l'Europe au sein d'un
grand Occident mais ne voient pas que l'Europe est indissolublement liée
à l'Afrique et à l'Asie.
Dans
un troisième chapitre, Mackinder explique comment l'"homme de la terre"
voit le monde. La conscience de l'unité territoriale eurasienne, écrit
notre géographe, est arrivée après la conscience de l'unité océanique.
En Angleterre et aux Etats-Unis, poursuit-il, on pense toujours en
termes de côtes et on n'a qu'une vague idée de ce qu'il y a derrière ces
côtes. On ne perçoit pas le mouvement d'unité eurasien. Il faut donc
cesser de penser le continent en dehors de lui, mais commencer à le
penser en dedans de lui. Le grand continent eurasien/africain se compose
de six régions naturelles: 1) l'Europe (avec le Maghreb non saharien et
l'actuelle Turquie) avec une population de marins et de paysans; 2) le
Heartland sibérien, avec sa côte arctique inaccessible, territoire des
nomades cavaliers; 3) le Rimland des moussons (sub-continent indien,
Indochine, Chine, Mandchourie, Corée, Kamtchatka, Malaisie), également
avec une population de marins et de paysans; 4) la zone vide du Sahara;
5) la péninsule arabique (avec l'Egypte à l'Est du Nil, le Sinaï et la
Mésopotamie), avec ses nomades cavaliers et chameliers; 6) le Heartland
méridional, soit toute l'Afrique au Sud du Sahara, peuplée d'éleveurs
nomades sans chevaux ni chameaux. Cette énorme masse continentale est
animée par une dialectique nomadisme/sédentarité, où les conquérants
mobiles, chameliers arabiques et cavaliers persiques et hunniques
conquièrent les terres des sédentaires paysans (Mésopotamie). Le chemin
de fer va organiser les zones occupées par ces nomades, tant en Sibérie
qu'en Arabie. L'Eurasie pourra devenir une si elle s'organise à partir
du Heartland et englobe tout de suite la Baltique et la Mer Noire, soit
par une alliance germano-russe (dans laquelle basculeront très vite la
Suède et la Turquie), soit par une conquête bolchévique. La "Terre du
Milieu" disposera alors de masses humaines suffisantes pour vivre en
totale autarcie et pour fermer le Grand Continent aux influences et au
commerce britanniques et américains. Dans un quatrième chapitre,
Mackinder traite de la rivalité entre les empires. Le fait saillant des
dernières décennies a été l'avance des cosaques sur tout le territoire
du heartland (de la "Terre du Milieu"), avance renforcée par l'extension
du réseau des chemins de fer en Asie centrale. Devant cette lente
unification de la masse continentale eurasiatique, l'Europe est divisée
en un Ouest et un Est, fondamentalement opposés de part et d'autre d'une
ligne Hambourg/Trieste, ce qui place Berlin et Vienne à l'Est. C'est
l'opposition entre le conservatisme organisateur, concrétisé par la
"ligue des trois empereurs" de Bismarck, et l'idéalisme démocratique. La
Rhénanie, qui est occidentalisée et a opté pour un droit basé sur le
Code Napoléon, est devenue le glacis avancé de l'Est en Europe de
l'Ouest. Bismarck, de surcroît, a réussi à diviser entre eux les peuples
latins, en déviant les énergies de la France vers le Maroc, l'Algérie
et la Tunisie, que convoitaient l'Espagne et l'Italie. Cet enferrement
de la France en Méditerranée occidentale l'éloigne du Rhin, laissant le
champ libre aux Allemands et aux Russes dans le reste de l'Europe. A
l'Est de la ligne Hambourg/Trieste, Bismarck doit jouer l'arbitre entre
les volontés divergentes de la Russie et de l'Autriche-Hongrie.
L'Occident français et britannique doit empêcher la Russie de franchir
les Dardannelles, comme pendant la guerre de Crimée, de débouler au
Proche-Orient (en Syrie et en Mésopotamie) et de menacer ainsi les
positions britanniques en Egypte (Suez) et dans le Golfe Persique
(Koweit). Dans un dernier chapitre, Mackinder tire le bilan de la
guerre mondiale. Pourquoi Guillaume II a-t-il envahi la France? Pour
deux motifs: 1) pour occuper l'éventuelle tête de pont britannique et
américaine en Europe; 2) pour gérer, les mains libres, l'accroissement
démographique allemand en pleine croissance et le dévier vers l'Est
russe et ottoman, où il y avait encore des marchés, des débouchés et des
terres arables. Mais l'Allemagne a été contrainte de pratiquer une
double politique, vu son écartèlement entre l'Est et l'Ouest. Hambourg,
port atlantique, est un défi à l'Angleterre et ouvre à l'Allemagne des
possibilités à l'Ouest, en direction de l'Afrique et de l'Amérique
latine. Pour Mackinder, Guillaume II aurait dû choisir ou l'Est ou
l'Ouest, entre Hambourg et les colonies, d'une part, et Bagdad et la
Russie, d'autre part. L'indécision allemande a donné la victoire à la
Grande-Bretagne mais cette victoire ne tient qu'à un fil, surtout depuis
les accords germano-bolchéviks de Brest-Litovsk. D'où, afin de pouvoir
gagner du temps pour consolider l'Empire britannique, il faut séparer
l'Allemagne de la Russie par un "cordon sanitaire", politique que suivra
à la lettre Lord Curzon.
Bibliographie
Pour
une bibliographie complète des oeuvres de Mackinder, se référer à
l'ouvrage de W.H. Parker, Mackinder. Geography as an Aid to Statecraft,
Oxford, Clarendon Press, 1982. Nous ne reprenons ci-dessous que les
ouvrages et articles principaux.
The
New Geography, 1886; Britain and the British Seas, 1902; "The
Geographical Pivot of History", Geographical Journal, XXIII, pp.
421-437 (trad. esp. "El pivote geografico de la historia" in Augusto B.
Rattenbach, Antologia Geopolitica, Pleamar, Buenos Aires, 1985);
"Man-Power as a Measure of national and Imperial Strength", National and
English Review, XIV, pp. 136-45; Seven Lectures on the United Kingdom,
1905; Money-Power and Man-Power, 1906; Our own Islands, 1906; Britain
and the British Seas, 2ième éd., 1907; "On Thinking Imperially", in
M.E. Sadler (ed.), Lectures on Empire, 1907; The Rhine: its Valley and
History, 1908; Lands beyond the Channel: an Elementary Study in
Geography, 1908; "The Geographical Conditions of the Defence of the
United Kingdom", National Defence, III (juillet 1909), pp. 89-107;
India: Eight Lectures prepared for the Visual Instruction Committee of
the Colonial Office, 1910; Distant Lands: an Elementary Study in
Geography, 1910; The Nations of the Modern World: an Elementary Study
in Geography, 1911; "The Strategical Geography of the Near East",
Journal of the Royal Artillery, XXXIX, pp. 195-204; The Modern British
State: an Introduction to the Study of Civics, 1914; Our Island
History: an Elementary Study in History, 1914; "Some Geographical
Aspects of International Reconstruction", in Scottish Geographical
Magazine, XXXIII, pp. 1-11; Democratic Ideals and Reality: a Study in
the Politics of Reconstruction, 1919; "General Report with Appendices on
the Situation in South Russia; Recommendations for Future Policy" in
Documents on British Foreign Policy, 1919-1939, 1st series, III, (édités
par E.L. Woodward et R. Butler), n° 656, pp. 768-87, HMSO, London,
1949, le texte date de 1920; The World War and After: a Concise
Narrative and some Tentative Ideas, 1924; "The Empire and the World", in
United Empire, XXV, 1934, pp. 519-522; "The Round World and the Winning
of the Peace", in Foreign Affairs, XXI, 1943, pp. 595-605.
Sur H.J. Mackinder:
L'ouvrage
le plus récent et le plus complet est celui de W.H. Parker, op. cit.;
P.M. Roxby, "Mr. Mackinder's Books on the Teaching of Geography and
History", Geographical Teacher, VII, 1914, pp. 404-407; C.R. Dryer,
"Mackinder's "World Island" and its American "satellite"", Geographical
Review, IX, 1920, pp. 205-207; Karl Haushofer, "Politische Erdkunde und
Geopolitik", in Karl Haushofer, Erich Obst, Hermann Lautensach, Otto
Maull, Bausteine zur Geopolitik, Berlin-Grunewald, 1928, pp. 49-77;
Karl Haushofer, Erdkunde, Geopolitik und Wehrwissenschaft, Munich,
1934; Karl Haushofer, Der Kontinentalblock - Mitteleuropa - Eurasien -
Japan, Munich, 1941 (inversion continentaliste des thèses de Mackinder,
au profit d'une alliance germano-russe; références explicites à
Mackinder); J.C. Malin, "Reflections on the Closed-Space Doctrines of
Turner and Mackinder and the Challenge to their Ideas by the Air Age",
Agricultural History, XVIII, 1944, pp. 65-74; E.W. Gilbert, "The Right
Honourable Sir Halford J. Mackinder, P.C., 1861-1947", Geographical
Journal, CX, 1947, pp. 94-99; H. Ormsby, "The Rt Honourable Sir Halford
J. Mackinder, P.C., 1861-1947", Geography, XXXII, 1947, pp. 136-137;
J.F. Unstead, "H.J. Mackinder and the New Geography", Geographical
Journal, CXIII, 1949, pp. 47-57; "Seven Lamps of Geography: an
Appreciation of the Teaching of Sir Halford J. Mackinder", Geography,
XXXVI, 1951, pp. 21-41; E.W. Gilbert, Préface à une réédition sous les
auspices de la Royal Geographical School (RGS) de deux textes de
Mackinder, "The Scope and Methods of Geography" et "The Geographical
Pivot of History", RGS, 1951; C. Troll, "Halford J. Mackinder als
Geograph und Geopolitiker" in Erdkunde, VI, 1952, pp. 177-178; C.
Kruszewski, "The Pivot of History", Foreign Affairs, XXXII, 1954, pp.
388-401; A.H. Hall, "Mackinder and the Course of Events", in Annals of
the American Association of Geography, XLV, 1955, pp. 109-126; D.W.
Meinig, "Heartland and Rimland in Eurasian History", in Western
Political Quarterly, IX, 1956, pp. 553-569; D.R. Mills, "The USSR: a
Re-Appraisal of Mackinder's Heartland Concept", in Scot. Geog. Mag.,
LXXII, 1956, pp. 144-152; B. Semmell, "Sir Halford Mackinder: Theorist
of Imperialism", Can. J. Econ. and Polit. Sci., XXIV, 1958, pp. 554-61;
Edward McNall Burns, Ideas in conflict, Methuen, London, 1960, pp.
520-527; L.M. Cantor, Halford Mackinder: his Contribution to Geography
and Education, thèse non publiée, Université de Londres, 1960; L.M.
Cantor, "Halford Mackinder: Pioneer of Adult Education", in Rewley House
Papers, III, 1960-61, 9, pp. 24-29; E.W. Gilbert, Sir Halford Mackinder
1861-1947: an Appreciation of his Life and Work, 1961; "The Rt
Honourable Sir Halford J; Mackinder, P.C., 1861-1947", Geographical
Journal, CXXVII, 1961, pp. 27-29; W.A.D. Jackson, "Mackinder and the
Communist Orbit", Canadian Geographer, VI, 1962, pp. 12-21; A.B. Dugan,
"Mackinder and his Critics Reconsidered", Journal of Politics, XXIV,
1962, pp. 241-257; N. Mikhaïlov, "Professor Makkinder i razgovor ob
utopiyakh", in Sovetskiy Soyuz, 212, 1967, pp. 20-21; J.A. Sylvester,
"Mackinder lernte von den Deutschen: eine ironische Kritik", in
Zeitschrift für Geopolitik, XXXIX, 1968, pp. 55-59; E.W. Gilbert,
"Halford Mackinder" in International Encyclopedia of Social Sciences,
New York, 1968; E.W. Gilbert & W.H. Parker, "Mackinder's
"Democratic Ideals and Reality" after 50 Years", in Geographical
Journal, CXXXV, 1969, pp. 228-231; C.F.J. Whebell, "Mackinder's
Heartland Theory in Practice Today", Geographical Magazine, XLII, 1970,
pp. 630-636; E.W. Gilbert, British Pioneers in Geography, 1972; C.
Cochran, "Mackinder's Heartland Theory: a Review", Assoc. of N. Dakota
Geog. Bulletin, XXIV, 1972, pp. 29-31; J.S. English, Halford J.
Mackinder (1861-1947), 1974; W.F. Pauly, "The Writings of Halford
Mackinder applied to the Evolution of Soviet Naval Power", in
Pennsylvania Geographer, XII, 1974, pp. 3-7; B.W. Blouet, Sir Halford
Mackinder 1861-1947: Some New Perspectives, Oxford School of Geography,
Research Paper 13, 1975; B.W. Blouet, "Halford Mackinder's Heartland
Thesis", Great Plains - Rocky Mountain Geographical Journal, V, 1976,
pp. 2-6; B.W. Blouet, "Sir Halford Mackinder as British High
Commissioner to South Russia, 1919-1920", Geographical Journal, CXIII,
1976, pp. 228-236; L.K.D. Kristof, "Mackinder's Concept of Heartland
and the Russians", preprint, XXIII, Int. Geogrl. Congr., Symposium, K5,
1976; Colin S. Gray, The Geopolitics of the Nuclear Era: Heartland,
Rimlands, and the Technological Revolution, National Strategy
Information Center, New York, 1977; Martin Wight, Power Politics, Royal
Institute of International Affairs, 1978, pp. 72-77; Derwent Whittlesey,
"Haushofer: les géopoliticiens", in Edward Mead Earle, Les maîtres de
la stratégie, tome II, Berger-Levrault, 1980; Jean Soppelsa, "De la
géographie à la géostratégie", in Les Cahiers Français, n°199-200,
1981; Paul Claval, "Histoire de la Géopolitique", in Magazine
Littéraire, 208, juin 1984, pp. 24-25; Michel Foucher, "Les pionniers",
in Magazine Littéraire, 208, juin 1984, pp. 26-27; Robert Steuckers,
"L'¦uvre de Mackinder, géographe britannique", in Vouloir, 31, juillet
1986, pp. 6-7; Gaspar Salcedo Ortega, "Para uma história da geopolítica
americana", in Futuro Presente (Lisbonne), 27/28 (2ième série), 1987;
Colin S. Gray, The Geopolitics of Super Power, University Press of
Kentucky, 1988; Robert Steuckers, "Panorama théorique de la
géopolitique", in Orientations, 12, 1990-91, pp. 3-13.
Au
Public Record Office du Foreign Office 800/251, on pourra consulter les
papiers privés de Mackinder, relatifs à sa mission en Russie
méridionale.
SYNERGIES EUROPÉENNES SEPTEMBRE 1991
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