Préface au livre de Carlos X Blanco: De Covadonga a la nacion espanola




Préface au livre de Carlos X Blanco: De Covadonga a la nacion espanola

L’ouvrage de Carlos X. Blanco traite de l’histoire de l’Espagne, de la Reconquista depuis le choc initial de Covadonga, où la première résistance victorieuse à l’invasion maure amorce la lente reconquête de la péninsule ibérique par ses peuples combattifs du Nord-Ouest. D’innombrables travaux ont déjà été rédigés sur ces pages d’histoire épiques mais l’ouvrage de Carlos X. Blanco possède une originalité sans pareille : elle s’inspire directement des thèses de l’Allemand Oswald Spengler, inspirateur de la « révolution conservatrice » et dont notre auteur est un spécialiste insigne en Espagne aujourd’hui. 

Pour Carlos X. Blanco, l’idée spenglérienne de la « sentinelle » s’applique aux peuples ibériques du Nord-Ouest de la péninsule ibérique. Après le choc initial de Covadonga, les Ordres de chevalerie espagnols, les Almogavares, plus tard l’Ordre de la Toison d’Or, les tercios comme meilleure infanterie des 16ème et 17ème siècles, sont les structures militaires dérivées de l’esprit des « peuples sentinelles ». Cet esprit de chevalerie est fondateur d’Empire et est  -dans le langage d’Oswald Spengler, que Carlos X. Blanco fait sien en l’appliquant à la matière qu’est l’histoire d’Espagne-  proprement « faustien ». Il fait dériver cet esprit faustien d’Espagne de la nature éminemment paysanne des peuples du Nord-Ouest, de leur fidélité à l’institution de la propriété foncière, de l’hacienda qui s’occupe d’agriculture et d’élevage donc  de concrétude fondamentale, en opposition, peut-être, à une autre Espagne, plus urbaine, plus « civilisée » (au sens négatif que Spengler donne au vocable « civilisation »). Mais sans l’apport de cette culture foncière et faustienne, sans cette rudesse rurale,  l’Espagne n’aurait pas connu son histoire glorieuse.

Mais l’Espagne actuelle, comme tous les autres peuples d’Europe, bascule dans le consumérisme que Carlos X. Blanco qualifie de néo-barbarisme, état navrant pire que tout « barbarisme », le « barbarisme » étant certes un état non politique, non impérial, même pas pré-impérial, mais, en revanche, le néo-barbarisme est le résultat d’une déliquescence irrémédiable, ne permettant plus aucun envol politique. Cependant, je pense que l’Espagne garde tout de même, plus que les autres peuples d’Europe, le sens de son histoire, même s’il est ténu par rapport à ce qu’il pourrait avoir été au cours du siècle qui a précédé l’amnésie américanomorphe que nous subissons de nos jours. La remarquable revue Desperta Ferro produit, à intervalles très réguliers, des numéros exceptionnels sur les pages d’histoire espagnole et européenne : en dépit de sa haute tenue intellectuelle et de sa scientificité, cette revue se vend dans tous les kiosques. C’est là un indice de la survivance, en plein néo-barbarisme, de cet esprit de résistance, paysan, foncier et faustien. L’objectif de Carlos X. Blanco est de réactiver l’énergie qui s’était manifestée à Covadonga, de réactiver l’esprit celto-germanique et wisigothique qui fut déterminant dans l’ethnogénèse de la nation impériale espagnole. Cette ethnogénèse, comme la plupart des ethnogénèses, s’est constituée dans la lutte pluriséculaire pour la reconquête du territoire, forgeant des types humains indépassables comme l’hidalgo. 

Carlos X. Blanco nous promène aussi dans les méandres de l’historiographie espagnole qui a interprété, de très diverses façons, cette dialectique entre le celto-germanisme du Nord-Ouest et le « méditerranisme » des côtes orientales de la péninsule, plus mozarabe et, par là même, plus encline au cosmopolitisme. Ces longs  débats sont, de fait, largement inconnus en dehors de l’Espagne, alors qu’il y aurait grand avantage à ce qu’ils ne soient plus ignorés parce qu’ils mettent en exergue des dynamiques contradictoires qui ont eu, toutes, une incidence non négligeable sur l’ensemble des dynamiques qui ont traversé l’histoire du continent européen. 

Pour Carlos X. Blanco, nous vivons une période de déclin, où règne l’ochlocratie, le pouvoir des foules sans formation, sans trognon intérieur, sans colonne vertébrale éthique. Cette ochlocratie, voulue par l’oligarchie ou ce que l’on appelle aujourd’hui la « superclasse », précipite les peuples dans la déchéance morale et physique, spectacle auquel nous assistons tous les jours, dans notre vie quotidienne. 

Le message de Carlos X. Blanco, le but de l’écriture de ce nouvel ouvrage d’inspiration spenglérienne, est d’amorcer un processus similaire et nécessaire à celui qui a déclenché la bataille de Covadonga, cette fois pour sortir, sous l’impulsion des  éléments encore sains de toutes les nations, du monde décadent soumis à l’ochlocratie et à l’oligarchie et pour réenclencher un processus de reconquête.

Cet ouvrage a donc une double fonction : sur le plan philosophique, appliquer, de manière originale et féconde, les analyses spenglériennes, propres à la « révolution conservatrice » ; sur le plan métapolitique et politique, exhorter les lecteurs à amorcer un esprit de résistance et de reconquête. 

Robert Steuckers.

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